Oui, j’aime manger! C’est même un peu le sens de mes journées, penser au repas suivant. Alors dans ces conditions, j’ai plutôt intérêt à bouger… et en matière de sport je l’avoue, je ne pense pas à la session suivante dès que j’ai fini la précédente. Vous en doutiez?
Il y a peu, j’ai parcouru un article très intéressant. Et même si dans le mot “parcouru” il y a “couru”, seuls mes yeux étaient en mouvement. Bref, revenons à cet article. Il s’agissait d’un post de The Conversation, qui traitait du manque de motivation à faire du sport si on se focalise sur le “bénéfice santé”, et non sur le plaisir qu’il procure. L’article est accessible ici, mais je vais vous le résumer car je préfère que vous ne passiez pas trop de temps dessus et que vous alliez au bout du mien, d’article, égoïste que je suis !
Résumé de l’article de « The Conversation » sur la pratique sportive
La rédactrice de cette chronique démontre brillamment que :
- le sport est très bénéfique pour notre santé, c’est un constat, il y a une relation positive entre activité physique et santé ;
- les messages de santé publique prônent le “manger, bouger” et ce message est entendu ;
- pourtant le niveau d’activité physique n’a jamais été aussi bas que ces dernières années, créant un décalage entre l’intention et le comportement ;
- parce que quand le choix entre faire du sport ou se laisser aller à une autre activité sédentaire se pose, la prise de décision va vers l’activité passive, car elle a une “valeur subjective” supérieure ;
- premier facteur qui mène à cette décision : la quantité d’effort. Le bénéfice du sport sur la santé n’est réel que si l’on pratique régulièrement et toute sa vie (on estime qu’il faudrait en faire 2h30 par semaine pour gagner jusqu’à 4 ans d’espérance de vie) ;
- deuxième facteur : la récompense n’est pas immédiate puisqu’il faut beaucoup pratiquer pour en voir les effets sur la santé ;
- troisième facteur : le scepticisme. On a tendance à sous-estimer les effets du sport et surtout, à ne pas attribuer les problèmes éventuels de santé à la non-pratique d’une activité physique régulière ;
- ces 3 facteurs fragilisent l’engagement, au profit d’activités sédentaires à récompense immédiate ;
- il faut donc intégrer la notion de “plaisir” dans les campagnes de sensibilisation à la pratique d’un sport, puisque c’est une sensation immédiate et plus engageante que la notion de “bénéfice sur la santé” ;
- et donc faire en sorte que nos sessions de sport soient agréables, en prenant pleine conscience de l’environnement, des émotions ressenties, en percevant le plaisir associé à cette expérience jusqu’à se sentir “bien dans ses baskets”.
Comment faire pour prendre du plaisir immédiat à pratiquer un sport?
Tadam! C’est là que j’interviens, avec mon expérience personnelle.
On commence par le topo : je ne suis ni sportive, ni courageuse, ni musclée. J’ai des demi-poumons, du gras ici et là et la motivation d’un cocker devant une assiette de salade. Bref, me mettre au sport n’a pas été une partie de… plaisir, justement.
Et pourtant, je m’y suis mise depuis déjà 2 ans. Tout a commencé fin 2020. Entre confinement et excès, mon corps est devenu tout flasque. J’ai pris conscience qu’il fallait vraiment que je fasse quelque chose. C’est plutôt bien tombé parce qu’à ce moment-là précisément, une collègue a eu l’idée, lors d’une visioconférence, de lancer un défi “sport” à notre équipe : on cumulait des points pour toute session de sport de l’un d’entre nous. A la clé, une bonne bouffe tous ensemble avec un budget adapté aux points collectifs gagnés. La récompense allait ruiner nos efforts, mais le jeu était original. J’ai donc rechaussé mes baskets et commencé à courir dans mon village.
Je donne ici une précision qui a son importance : j’ai la chance d’habiter à la campagne, et d’avoir tout un tas de chemins et de lacs facilement accessibles dans un kilométrage proche, ça aide. Mais je suis persuadée qu’il y a aussi des coins et parcours très sympas en ville pour fouler le sol, même bétonné.
Marquer ses exploits sportifs
Ma première fierté a été de voir mon prénom et mes premières petites courses de 20 minutes agrémenter le tableau. Par contre, au niveau des kilomètres, c’était pas fou-fou, et l’effort était difficile. Comme dans l’article de The Conversation, force est de constater que les effets sur la santé, j’en voyais pas la couleur, en tout cas pas les premiers temps. Mais quand le défi a été terminé, au bout d’un mois, je me suis surprise à réclamer aux collègues de continuer ce jeu un mois de plus. Je commençais à prendre goût, non pas à la course, mais au petit challenge associé, et surtout, à inscrire mon prénom dans les cases.
On a donc remis le couvert, et moi les baskets. Puis à la fin du mois, mes collègues m’ont dit “écoute Odile, t’es gentille, mais là, stop!”
Le tableau de mes courses, sous les yeux
Je me suis donc retrouvée seule, face à ma motivation qui retombait comme un soufflet, à ne plus savoir comment trouver la foi pour continuer en solo. J’ai regardé mes mollets, qui commençaient tout juste à montrer une jolie courbe, un semblant de muscle sous le gras. Et je me suis dit : bichette, ne t’arrête pas en si bonne voie. J’ai pris mon reste de motivation et j’ai couru… au magasin acheter un rouleau adhésif blanc de tableau feutre, d’un mètre sur un mètre. Je l’ai collé à ma porte de placard coulissant, dans la chambre. J’ai créé un agenda avec chaque jour, de chaque semaine, pour l’année. Plus qu’à remplir les cases avec chaque course et le nombre de kilomètres parcourus. Le défi était désormais de taille (1mx1m) et je savais que chaque inscription au tableau allait me faire triper!
Avant de courir, se motiver
Là, je suis censée vous trouver un argument infaillible pour vous motiver et prendre la décision d’aller courir. Malheureusement, je vais vous décevoir : je n’en ai pas, zéro pointé. Chaque décision d’aller courir est un calvaire, par manque de motivation. Rien ne me fait dire “chouette, je vais courir”, même pas au bout de 2 ans de running régulier. Ni cette nouvelle tenue trop craquante, assortie à la couleur des baskets et qui a coûté une fortune. Et je ne vous parle même pas des arguments que mon cerveau trouve en quelques secondes pour éviter le départ : pluie, vent, chaleur, boue, mal à la tête, pas le temps, courbatures de l’avant-veille, la nuit va tomber, j’ai pas assez déjeuner… tout y passe.
Le seul secret? Se faire violence et arracher le pansement au plus vite. Ne pas laisser aux mauvaises pensées le temps d’influencer votre mental. Allez hop, on y va !
Pendant la course, ouvrir les yeux
Une fois les premières foulées engagées, difficile de revenir en arrière. On sait qu’on va souffrir, mais trop tard pour faire demi-tour. Mon conseil, c’est de transformer ces souffrances en plaisir, et là pour le coup, j’ai plein de recommandations.
La clé, c’est d’ouvrir les yeux et observer le parcours, la nature, les gens croisés. J’ai plusieurs trajets que j’aime faire, et sur ces chemins, je repère des lieux qui éveillent ma curiosité : des jardins, des arbres, des cultures, des maisons atypiques. Par exemple, j’ai repéré la maison d’une dame un peu âgée, et je suis fascinée par son potager. A chaque passage, le temps des 7 secondes où mes yeux se posent sur le jardin, je m’amuse à reconnaître les légumes plantés. Je vois l’évolution course après course. Par exemple ce plant de courgettes, qui finit par envahir le bout de terre, puis l’apparition du légume, sa croissance, sa cueillette, la fin de saison et l’arrachage.
Observer tout au long de l’année
Je saucissonne aussi mes observations, en fonction de la saison. Janvier, c’est un mois très pauvre en observations. Mais dès février, les mimosas fleurissent, puis quelques violettes sortent de terre. En mars, voilà les jonquilles, repérées dans un jardin. Avril et mai, tout commence à fleurir et pousser. Juin, juillet, août, les cultures de colza, maïs et tournesol transforment et colorent la campagne. Septembre, octobre, les premières couleurs d’automne, c’est juste magique. En novembre et décembre, les prairies gèlent, les maisons sont décorées, les cheminées fument. Toutes ces observations accompagnent mes courses et soulagent les muscles endoloris. Elles portent mes efforts, le plaisir est immédiat. Il ne tient qu’à moi de transformer des images instantanées en belles histoires sur la durée. C’est la magie de courir en traversant non seulement les paysages, mais aussi le temps.
Pendant la course, s’écouter
Observer la nature, c’est bien. Mais on ne va pas pour autant fermer les yeux sur ses efforts. Et pour que votre envie de continuer le sport reste intacte, il faut vous écouter. Je ne parle pas d’écouter vos désirs, mais votre corps. Pour le cas de la course, je vais vous raconter mon expérience. J’ai démarré avec des petites distances (3 km) puis j’ai augmenté à une distance de 5 km. Là, je ne pouvais pas faire beaucoup plus, j’étais vraiment essoufflée.
Une copine qui court régulièrement m’a dit que mon cardio devait être trop élevé et qu’il fallait ralentir. Mais ça m’a plutôt vexée parce que je ne vais déjà pas bien vite. J’ai aussitôt pensé que ça ne servait à rien de courir si c’était au rythme d’une tortue. Elle avait une montre cardio et m’en a vanté les mérites. Mon anniversaire approchant, j’ai commandé ma montre et là, chose assez incroyable : mon cardio était en effet beaucoup trop élevé, et en me régulant, je suis passée de 5km à 10km en 2 séances! Joie, fierté, et soulagement de savoir que je pouvais m’améliorer. Par peur du ridicule, je ne m’étais pas écoutée et je frôlais la démotivation, voire la crise cardiaque.
Après la course, c’est le Graal
C’est quand on s’arrête de courir que le meilleur est à venir! La copine endorphine débarque et vous met dans un état de plaisir et de zénitude qui vous ferait accepter un repas chez Belle-maman sans sourciller. En plus, vous pourrez profiter de ce repas pour vanter vos mérites, vos grammes perdus et vos jolis cuisseaux, un verre de vin à 83,5 calories à la main, sans culpabilité. Et le tableau feutré, si vous l’avez fait, aura une ligne en plus. Comble de l’autosatisfaction : des applications peuvent enregistrer vos courses, la plupart sont gratuites. J’utilise Strava, que j’aime pour son fonctionnement communautaire, et ses fonctionnalités statistiques. A la fin de l’année, j’apprécie de lire le cumul de mes heures de courses, le nombre de sorties et le kilométrage parcouru. En 2022 par exemple, j’ai couru l’équivalent d’un Toulouse-Paris, ça claque non?
Et les 7 conseils de tata Odile, on allait oublier?
Si vous voulez courir en ayant un maximum de plaisir immédiat et ainsi installer cette habitude dans la durée, voici mes conseils :
- ne pas réfléchir à l’envie d’aller courir, elle ne viendra pas, et partir le plus vite possible
- choisir des parcours que l’on peut prolonger ou écourter en fonction de sa forme
- repérer des lieux susceptibles d’évoluer dans le temps, pour avoir une timeline de choses à observer
- enlever les écouteurs et la musique pour sortir de sa bulle, et profiter plutôt des images, sons et odeurs de votre parcours
- ménager sa santé : écouter son corps et adapter l’effort à ses capacités, sans jugement ni comparaison
- suivre ses exploits : noter ses courses et/ou les enregistrer dans une application, pour mieux célébrer ensuite ses progrès
- être fier et raconter ses courses à son entourage, parce que ça fait du bien et que tout le monde ne fait pas cet effort
Je ne sais pas si je vous ai convaincus de chausser les baskets, ou de vous lancer dans un sport quel qu’il soit. Mais le message principal, c’est qu’il y a toujours une part de plaisir relativement immédiat à l’effort physique, qu’il faut parfois aller chercher dans un recoin. Pour ce qui est du bénéfice sur la santé, aussi loin soit-il, il arrivera un jour et ce sera le combo parfait : plaisir immédiat + bénéfice santé.
Vous mettez votre tenue? Je vous attends, on va parcourir les champs. Au bout du chemin, de l’autre côté du pont, le colza met déjà ses feuilles. Dans 3 mois, tout sera jaune!
Tata Odile, ce partage d’expériences est d’utilité publique ! Bravo pour les efforts et cet article !
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